« Ne t’en fais pas, je suis sûr qu’il ne le pensait pas. »

Cette phrase, combien de fois Marius l’avait-il prononcée pour rassurer et réconforter Franck lorsque celui-ci se plaignait du comportement ou des paroles de son père ? Le jeune homme ne le savait plus, mais ce qu’il savait était que, depuis quelques temps, cela l’ennuyait de plus en plus.

Ce soir-là, Franck avait proposé à Marius de sortir avec quelques-uns de ses amis du Grand Conseil et le jeune sorcier avait accepté, même s’il avait dû se faire un peu prier par son petit ami. Ils étaient justement sur le point de sortir de l’appartement de Franck lorsque ce dernier avait mentionné la dernière remarque blessante de son paternel. Tout en lassant ses chaussures, Marius fit un effort pour ne pas souffler ou rouler des yeux. Il se redressa finalement et sourit d’un air légèrement crispé à Franck :
- Tu sais comment il est. N’y pense donc plus et allons passer une bonne soirée, lui proposa-t-il en plaquant un baiser sur ses lèvres pour clore le sujet.

Ils sortirent de l’immeuble et marchèrent côte à côte jusqu’au pub Le Graal où ils devaient rejoindre le groupe d’amis de Franck. Ils entrèrent dans l’établissement où une bonne ambiance régnait en ce vendredi soir. Ils repérèrent sans mal les amis de Franck et allèrent vers eux. Ils avaient déjà commandé des verres de rhum groseille qu’ils tendirent au couple en guise de salutations :
- Santé !

Marius but son verre d’une traite et un sourire vint finalement étirer le coin de ses lèvres.
- Ca va, Alana ? demanda-t-il en prenant place aux côtés d’une jeune femme blonde.
- Très bien mon p’tit Marius, et toi ? Les affaires marchent toujours malgré les restrictions sur les baguettes magiques ?
- Oh, tu sais, il y a toujours moyen de s’arranger, répondit-il avec un air énigmatique.
- Pff, l’écoute pas, Alana, bientôt il va te faire croire qu’il s’est lancé dans un trafic de baguettes magiques, intervint Louis, un jeune homme brun impeccablement coiffé.

*Si tu savais…* songea Marius avec un sourire ironique.

Cependant, en guise de réponse, il préféra boire un autre verre de rhum groseille et jeta un regard aux alentours, tout en passant une main dans le dos de Franck assis à ses côtés. Il finit par concentrer son attention sur ce qu’était en train de dire son petit ami.

Une fois de plus, Franck s'était attiré les foudres de son père, alors qu'il était simplement venu saluer ses soeurs et sa mère. Le motif n'était pas vraiment intéressant, Franck souffrait surtout du rejet de son père. Tout était prétexte aux insultes, et cela touchait profondément l'ancien Noctua.
Personne ne prenait partie pour lui, ni sa mère, ni ses soeurs. Non pas pour désapprouver ses choix, mais par volonté de ne pas s'impliquer dans un conflit qui ne les concernait pas, si bien que Franck se sentait très seul.

Quand il retrouva Marius, il éprouva le besoin d'en parler et de se confier, mais Marius ne semblait pas comprendre combien ce qui s'était passé pouvait l'affecter. Il écourta la conversation en minimisant les faits, conseillant à Franck de ne plus y penser. Oui, il savait comment il était.
Franck, blasé, enfonça les mains dans ses poches et regarda vers ses pieds tandis que Marius ponctuait la conversation d'un baiser. Il n'y avait plus rien à dire. Ou bien ça ne l'intéressait pas, ou bien c'était lui qui était vraiment trop susceptible sur le sujet. Mais il ne voulait pas reconnaître que le problème pouvait venir de lui.

Au programme était prévu ue bonne soirée entre amis, détente, hydromel, lutin bleu et anecdotes. Franck, qui appréciait ce genre de soirée, n'y était pas vraiment cette fois. Il se sentait très seul dans ses malheurs et aurait voulu, pour une fois, passer la soirée tranquillement dans son appartement, bien que l'idée de cette soirée venait de lui.
Il commanda un whisky pur feu en passant près du comptoir et se posa près de Marius qui engageait la discutions avec Alana, une de leurs amies de longue date. C'était parfait, parce qu'avec elle, qui était très bavarde, il n'avait pas besoin de faire beaucoup d'efforts pour parler, et elle s'entendait très bien avec Marius alors avec un peu de chance il ne serait pas obligé de s'impliquer dans la conversation.
Non, vraiment, Franck n'était pas disposé à passer une bonne soirée.

Quelqu'un fît glisser devant lui un rhum-groseille pour lequel il laissa tomber son whisky. Il n'avait rien demandé, mais pourquoi pas. Tout en sirotant sa boisson, il écoutait d'une oreille la conversation sans regarder Marius.

- Cesse de dire des sottises, Louis ... Marius ne ferait jamais quelque-chose d'illégal dans le seul but d'obtenir du profit. Ce qu'il voulait dire c'est que quoi qu'il arrive, il a toujours du travail !

Franck n'avait vraiment aucune patience ce soir-là et n'avait pas la volonté de se mettre dans un autre conflit, mais il ne voulait pas que l'on dise n'importe quoi sur Marius. Il jeta un oeil noir vers Louis. Si c'était de l'humour alors ce n'était vraiment pas drôle. Ce genre d'accusations pouvait aller assez loin, par les temps qui courrent. Le travail de Franck était justement de contrôler toutes les fraudes, et les contrefaçons d'objet magique. Jamais Marius ne le trahirait, il en était persuadé.

- Ca marche toujours bien le traitement du guano d'hypogriffe ?

Oui, rien ne l'empêchait d'être hautain ! Il pris son de whisky et alla se poser un peu plus loin, désireux de s'éloigner de Louis, fixant Marius du coin de l'oeil. Il se disait qu'il laisserait passer deux dizaines de minutes au plus, avant de lui proposer discrètement de rentrer.